L'inceste désigne le rapport charnel entre proches parents ou alliés dont le mariage est prohibé par la loi.
Inceste : définition et champ d'application
En ligne directe, le mariage est prohibé entre tous les ascendants et descendants et les alliés dans la même ligne (article 161 du Code civil). En ligne collatérale, le mariage est prohibé entre le frère et la sœur, entre frères et entre sœurs (article 162 du Code civil). Le mariage est également prohibé entre l'oncle et la nièce ou le neveu, et entre la tante et le neveu ou la nièce (article 163 du Code civil). On parle d'empêchement à mariage, en ce sens que l'inceste constitue un obstacle au mariage entre certaines personnes.
Bon à savoir : l'empêchement à mariage peut être levé par dispense du président de la République, c'est-à-dire l'autorisation de faire, exceptionnellement, ce qui est normalement prohibé (article 164 du Code civil).
L'inceste absolu désigne l'union dont la prohibition ne peut être levée par une dispense (mariage entre parents en ligne directe ou entre frère et sœur). L'inceste relatif désigne l'union dont la prohibition peut être levée par une dispense.
Bon à savoir : les textes de loi ne comportent pas le terme « inceste » ; en effet, une loi du 8 février 2010 l'avait inséré dans le Code pénal mais a été censurée par le Conseil constitutionnel car la définition des personnes pouvant être poursuivies à ce titre était trop imprécise ; pour autant, il n'en demeure pas moins interdit et réprimé par la loi.
Conséquences de l'inceste
En droit civil
Sur plan civil, le mariage incestueux est frappé de nullité.
Bon à savoir : la nullité est la sanction prononcée par le juge et consistant dans la disparition rétroactive de l'acte juridique (ici, le mariage) qui ne remplit pas les conditions requises pour sa formation.
Quant à la filiation incestueuse (c'est-à-dire lorsqu'un enfant est issu de la relation incestueuse), elle est strictement régie par la loi. En effet, la filiation ne peut être établie en même temps des 2 côtés dans le cas d'inceste absolu (entre ligne directe ou entre frères et sœurs), hypothèse pour laquelle la loi n'admet aucune dispense en faveur du mariage du père et de la mère. La prohibition exclut seulement l'établissement cumulé des filiations paternelle et maternelle mais ne prohibe pas l'établissement de l'une des 2 filiations (article 310-2 du Code civil).
Bon à savoir : il appartient au ministère public de veiller au respect de l'interdiction d'établir la double filiation d'un enfant incestueux en intentant, si nécessaire, une action en contestation de la filiation ou un recours contre un jugement d'adoption qui irait à l'encontre de la prohibition posée.
Afin que l'enfant ne soit pas pénalisé par l’interdiction d'établir la double filiation, il existe la possibilité pour lui d'intenter une action aux fins de subsides contre son père envers lequel il ne peut établir sa filiation.
Bon à savoir : l'action aux fins de subsides est une action en justice qui appartient à tout enfant dont la filiation paternelle n'est pas légalement établie pour obtenir de celui qui a eu des relations sexuelles avec sa mère pendant la période légale de conception une pension destinée à couvrir ses frais d'entretien et d'éducation, sans avoir à prouver la paternité.
En droit pénal
Sur le plan procédural, la loi Perben II du 9 mars 2004 a étendu le délai de prescription des crimes de 10 à 20 ans lorsque la victime est mineure, délai qui ne commence à courir qu’à compter de la majorité de la victime.
Bon à savoir : il n'est pas nécessaire que la victime porte plainte ou qu'elle soit contrainte d'apporter la preuve de l'inceste : le procureur de la République peut agir dès lors qu’il a connaissance d’une présomption d’inceste.
Les articles 434-1 et suivants du Code pénal imposent à tout citoyen d’agir dès lors qu’il a connaissance de la situation d’un enfant en danger, en informant les autorités compétentes sur la situation d’un mineur. Pareillement, l’article 223-6 du Code pénal condamne toute personne qui n’a pas entrepris de démarche suffisante pour protéger le mineur alors qu’il avait connaissance de l’imminence de l’infraction.
Par ailleurs, les professionnels de santé ont l'obligation de faire un signalement par écrit, sous peine d'action judiciaire pour entrave à la justice en cas d'abstention de leur part : l’article 226-14 du Code pénal permet la levée du secret professionnel. C'est la loi du 5 novembre 2015 qui a introduit une protection de la responsabilité civile pénale et disciplinaire des professionnels de santé en cas de signalement de soupçons de violence envers un mineur.
Sur le plan pénal, l'inceste n'est pas une infraction spécifique mais une circonstance aggravante du viol (puni de 20 ans de réclusion criminelle), des agressions sexuelles (punies de 7 ans d'emprisonnement et 100 000 € d'amende, voire 10 ans et 150 000 € si le mineur a moins de 15 ans), ainsi que de l'infraction de mise en péril des mineurs de moins de 15 ans par atteinte sexuelle (punie de 5 ans d'emprisonnement et 75 000 € d'amende).
Bon à savoir : la loi n° 2018-703 du 3 août 2018 a modifié l'article 222-31-1 du Code pénal afin d'étendre la qualification d'inceste à l'ensemble des victimes de viol ou d'agression sexuelle, et non plus seulement aux mineurs.
Il est, en outre, un des éléments constitutifs de l'infraction de mise en péril des mineurs de plus de 15 ans par atteinte sexuelle.
La loi n° 2021-478 du 21 avril 2021 crée 2 nouvelles infractions pour punir les délits et crimes incestueux commis sur les enfants :
- Le crime de viol incestueux sur mineur (de moins de 18 ans), puni de 20 ans de réclusion criminelle.
- Le délit d'agression sexuelle incestueuse sur mineur (de moins de 18 ans), puni de 10 ans de prison et de 150 000 € d'amende.
Bon à savoir : une clause dite « Roméo et Juliette » est mise en place pour les préserver les relations d’amour d'adolescents lorsque l’auteur et le mineur ont moins de 5 ans d’écart d’âge. Cette clause ne s’applique pas en cas d’inceste.
Inceste : changement de nom
La victime d'un inceste peut changer de nom dès lors qu'elle justifie d'un intérêt légitime et qu'elle soit majeure. Il suffit de produire le jugement qui condamne l'agresseur dont elle porte le nom.
Constitution du dossier
Le dossier est constitué des documents suivants :
- la demande expresse de la victime de l'inceste, qui expose les motifs pour lesquels elle ne veut ou ne peut plus porter son nom d'origine, et indique le nouveau nom choisi ;
- le jugement portant condamnation de l'agresseur ;
- les actes de naissance de toutes les personnes concernées ;
- un justificatif de la nationalité française ;
- le bulletin n° 3 du casier judiciaire de la victime ;
- la justification de la publication de la demande faite dans un journal officiel d'annonces légales.
Procédure à suivre
L'ensemble du dossier de la victime de l'inceste est à adresser au ministre de la Justice, soit par courrier, soit par dépôt au procureur de la République du tribunal judiciaire (ex-tribunal de grande instance) du domicile de la victime. Le dossier est ensuite étudié, et il est procédé à une enquête.
Si la demande de changement de nom est acceptée:
- un décret est pris par le Premier ministre et publié au Journal officiel ;
- la mention du nouveau nom est portée sur les actes de l'état civil sur réquisition du procureur de la République de la commune de naissance de la victime de l'inceste.
Bon à savoir : la procédure de changement de nom prend une année environ, à la condition qu'il n'y ait pas de contestation.